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Energie.
Au Danemark, les champs géants d’éoliennes en mer ne trouvent pas preneurs : “vraiment décevant”
La première manche du “plus grand appel d’offres de l’histoire danoise” en matière d’énergie éolienne en mer a été boudée par les groupes énergétiques, jeudi 5 décembre. Une déconvenue “catastrophique” en matière d’objectifs climatiques, estime la presse, même si un second round aura lieu en 2025.
Les groupes énergétiques avaient jusqu’au jeudi 5 décembre à 14 heures (heure de Copenhague) pour déposer leurs offres. Les attentes étaient grandes du côté des autorités danoises, avec en ligne de mire des objectifs climatiques à atteindre. Mais une fois l’heure passée, aucune offre n’a été déposée en vue d’installer et d’exploiter trois immenses champs d’éoliennes offshore dans l’ouest du royaume.
Cette procédure devait donner le véritable “coup de départ de ‘l’aventure éolienne offshore’ sur laquelle le gouvernement a bâti une grande partie de sa politique énergétique depuis des années”, constate Politiken, journal de centre gauche.
La date butoir du 5 décembre ne portait que sur la moitié d’un projet qualifié par les autorités de “plus grand appel d’offres de l’histoire danoise” en matière d’éoliennes en mer, avec une capacité minimum de 6 gigawatts (GW) pouvant être portée ensuite à 9 GW. En guise de comparaison, les 17 parcs éoliens offshore danois actuellement en activité ont une capacité totale de 2,7 GW.
Contre le “gaz polluant de Poutine”
Les trois champs boudés jeudi étaient prévus en mer du Nord, au large du littoral ouest. Trois autres sites, d’une capacité initiale identique (3 GW) et situés plus à l’est (dans le Kattegat et en mer Baltique), font l’objet d’un autre appel, qui sera clos le 1er avril 2025.
En tout état de cause, l’absence de soumissionnaires au premier round “est vraiment décevante”, a admis Lars Aagaard, le ministre du Climat et de l’Énergie, cité par l’agence de presse Ritzau dans une dépêche reprise par Ekstra Bladet. En lançant l’appel d’offres, en avril, ce ministre de centre droit s’était félicité par avance d’un projet qui préserverait le royaume du “gaz polluant de Poutine” et en ferait “le centre européen de l’énergie verte”.
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L’annonce de jeudi constitue “un fiasco retentissant”, juge le site d’informations économiques Finans. Car, ajoute-t-il dans un autre article reproduit par Jyllands-Posten (son propriétaire de tendance conservatrice), les trois champs en question étaient censés fournir de l’électricité verte à “un grand nombre d’entreprises européennes en quête d’énergie propre et bon marché”.
Or “la rentabilité [du projet] était insuffisante pour se lancer dans un tel investissement”, alors que les taux d’intérêt sont élevés et le prix de l’électricité bas, a expliqué un porte-parole de Vattenfall, un des groupes (avec, entre autres, le français TotalEnergies et l’allemand RWE) ayant manifesté leur intérêt avant de renoncer. Pourtant, “le site était bien, il y a beaucoup de vent et un bon fond marin”, a regretté ce représentant du groupe suédois, cité dans Ekstra Bladet.
“C’est catastrophique”
S’ajoute à ces facteurs le fait que le gouvernement, en février 2023, avait changé les règles dans l’attribution des nouveaux champs éoliens en mer, tout en exigeant que l’État en devienne copropriétaire à hauteur de 20 %. “Aucun autre pays ne demande ça. Nous avons cru que nous pourrions obtenir beaucoup plus [de recettes] que nous n’allons finir par en gagner”, raille le journaliste climat de Politiken. Pour lui, “c’est catastrophique”, compte tenu des objectifs que le pays s’est fixés pour lutter contre le dérèglement climatique.
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La coalition au pouvoir, allant des sociaux-démocrates aux libéraux, a désormais l’intention de revoir les conditions d’attribution, qu’il faudra ensuite faire accepter par d’autres partis, avant de relancer l’appel d’offres ayant fait un flop. “On parle plus d’années que de mois”, pronostique ce journal. Quant à l’appel d’offres clos le 1er avril 2025, rien ne garantit qu’il attirera des entreprises vu les conditions de vent moins favorables.
Tout n’est pas pour autant sombre dans l’un des pays pionniers de l’éolien offshore (ses premières installations remontent à 1991). Le 31 octobre, RWE a obtenu le feu vert définitif des autorités en vue de bâtir ce qui sera le plus grand parc danois du genre, baptisé “Thor”, avec 72 mâts et une capacité de 1 GW, rapportait alors Berlingske.