--
Communiqué du 3 janvier 2024
Enquêtes publiques pipées,
Eolien en mer, le veau d’or de nos gouvernants.
L’avalanche - Consultation sur la stratégie Energie-Climat, débat public sur la Planification de l’espace maritime et l’aménagement des façades : des simulacres de participation des citoyens sont orchestrés par les autorités avant l’officialisation de textes destinés à alimenter le débat parlementaire pour la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE3). Celle-ci devrait fixer les orientations énergétiques pour la période, 2024 à 2035.
Tout observateur impartial constatera que les règles du jeu sont pipées, car à chaque fois les conclusions principales – qui auraient dû résulter de la PPE3 - ont été fixées à l’avance par le discours de Belfort du président de la République en février 2022, ou par des précisions ultérieures : relance de principe du nucléaire, et en même temps lancement immédiat d’une révolution industrielle du renouvelable, éolien et solaire.
Sa capacité devrait surpasser largement celle du nucléaire installé : objectif 2035 = 170 GW d’énergies renouvelables intermittentes, pour 62 GW de nucléaire existant.
La justification de ce projet pharaonique repose toute entière sur l’hypothèse d’une croissance vertigineuse de la consommation d’électricité, provoquée par le transfert massif vers l’électricité d’usages alimentés jusque-là par des combustibles émetteurs de CO2 (mobilité électrique, chaleur industrielle ou domestique...). Une production d’énergie électrique d’au moins 600 TWh devrait être disponible en 2035, pour 450 en 2020. Cela malgré des efforts de « sobriété » et de « flexibilité » déjà attendus des Français.
Débats publics et consultations sont seulement organisés pour préparer l’opinion aux transformations socioéconomiques et environnementales à venir, qui seront majeures pour la vie des gens et la biodiversité. Dans les documents préparatoires à destination du public apparaît cet objectif prioritaire : ancrer dans les esprits que le développement massif de l’éolien, terrestre et maintenant offshore, est une nécessité, les seuls éléments ouverts à la concertation restant le choix des emplacements.
Bien que ne se faisant guère d’illusion sur l’écoute dont peuvent bénéficier les opinions divergentes, les Gardiens du Large ont pour principe de remettre une contribution à ces diverses enquêtes. Les points principaux en sont :
1. Selon le code français de l’environnement L. 122-4 et le droit européen (directive 2001/42/CE) de tels plans et programmes doivent faire l’objet d’une évaluation environnementale préalable, ce qui n’est jamais le cas.
2. Le recours massif à l’énergie éolienne ne répond pas aux motivations qui lui sont attribuées : le discours constant était jusque-là que l’éolien servait à décarboner le secteur électrique, pourtant déjà non émetteur de CO2 à 90% grâce aux productions hydraulique et nucléaire. Or le RTE lui-même (Réseau de Transport d’Electricité) a démontré en 2020 que le faible secteur de la production électrique fossile français (résiduel charbon + gaz) était déjà décarboné, sa production pouvant être remplacée en périodes ventées par celle des éoliennes terrestres. Dès lors, l’électricité ne pouvant être massivement stockée, toute éolienne nouvelle, en particulier tout le secteur éolien offshore, ne produira plus que pour l’exportation d’électricité, principalement vers l’Allemagne, s’y substituant à sa vaste production fossile carbonée.
L’analyse des courbes de production de l’année 2023 (site eCO2mix du RTE) le démontre à l’envi : quand il y a du vent (surtout l’hiver) la France exporte environ la même quantité d’électricité éolienne, notamment vers l’Allemagne.
EN RESUME, LE DEVELOPPEMENT DE L’EOLIEN EN FRANCE A ETE UN MECANISME TROMPEUR D’AIDE FINANCIERE GRATUITE A LA DECARBONATION DES CENTRALES FOSSILES ALLEMANDES.
3. L’argument de remplacement, un scénario bancal – L’argument de la décarbonation en France étant maintenant largement éventé, un autre prend la place immédiatement pour justifier la poursuite de la construction d’éoliennes : répondre dans l’urgence au brutal accroissement de la demande d’électricité d’ici à 2035, antérieurement à la mise en service de nouvelles centrales nucléaires (EPR2). Le même mécanisme masqué d’aide financière gratuite à l’Allemagne et à ses voisins pourra donc se poursuivre, mais en multipliant maintenant les risques de délestage ou de black-out en France : la production éolienne n’étant pas garantie quand on en a besoin, les nouvelles utilisations transférées vers l’électricité, mais avec elles tout le système électrique, seront mis en péril en absence de vent (situation fréquente durant les périodes de froid des longs anticyclones d’hiver). Et les nécessaires centrales à gaz qui devraient alors y suppléer ne sont pas prévues dans les scénarios d’investissements… Un comble pour notre souveraineté énergétique !
Cet accent mis sur le développement des besoins d’électricité pour promouvoir l’éolien tient au jeu d’influences mis en scène par RTE. Derrière le paravent des subventions publiques, à aucun moment les coûts complets réels pour le pays ne sont évalués ; traitement de l’intermittence, renforcement et reconversions des réseaux haute et très haute tension, ils se chiffrent en centaines de milliards d’euros, promettant poursuite de l’explosion du prix de l’électricité et taxes diverses.
Une autre politique est à privilégier qui passe par un accroissement de l’autoconsommation et par des efforts majeurs sur le secteur des énergies renouvelables hors électricité, principalement à travers les atouts connus du vecteur chaleur (chaleur fatale des industries, pompes à chaleur et géothermie, chaleur solaire, réseaux de chaleur, ressources de la biomasse, biocarburants pour moteurs thermiques, etc.…).
4. Arrêter le massacre de la façade Atlantique !
Le débat public en cours, qui doit s’étirer jusqu’en avril 2024, porte sur la planification des façades maritimes (en Bretagne façade NAMO = Nord-Atlantique-Manche-Ouest). Son but principal est de fixer la cartographie les zones prioritaires pour implanter 17 à 25 000 MW d’industrie éolienne en mer (horizon 2050), là où actuellement 1 700 MW sont achevés ou en consultation (Saint-Nazaire, Saint-Brieuc, Yeu-Noirmoutier et Bretagne-Sud). C’est la composante bretonne des 45 000 MW promis pour 2050 à l’ensemble du littoral français, en 50 parcs équivalent à celui de Bretagne-Sud.
Pour la seule façade NAMO, la surface prise en mer serait celle d’un département français ; elle sera vouée à l’industrialisation, avec des dégâts majeurs sur le milieu marin, sa biodiversité, son économie, ses paysages, ses attraits touristiques… De façon parallèle l’éolien terrestre, déjà si envahissant sur les territoires, verrait sa capacité multipliée par deux, aggravant l’industrialisation des campagnes.
La ministre Agnès Pannier-Runacher ne le cache pas : « La transformation à engager dans les trois prochaines décennies est d’une ampleur comparable à celle de la première révolution industrielle. » … Germinal sur les côtes bretonnes ! !
Dans l’esprit des dirigeants, qu’importe les consultations publiques, leurs programmes étant déjà arrêtés ; ainsi le 28 novembre à Nantes, Emmanuel Macron a annoncé un appel d’offres groupé de 10 000 MW en 2025… hors débat parlementaire et PPE3. Qu’importe aussi les contraintes techniques, les parcs flottants étant envisagés sans retour d’expérience industrielle véritable.
Un moratoire des projets éoliens industriels s’impose